Cette étude du Dr Pierre Fongho Suh donne un état des lieux de la trypanosomiase bovine dans la région de l’Extrême-Nord du Cameroun. Elle s’attarde également sur les potentiels vecteurs mécaniques des trypanosomes chez les animaux, 4 décennies après l’élimination de la mouche tsé-tsé.
La région de l’Extrême-Nord du Cameroun est connue comme l’une des zones de production animale les plus arides du bassin du lac Tchad. Ce fut un foyer historique de trypanosomiase animale jusqu’à l’aube des années 70, période coïncidant avec l’éradication des glossines, vecteurs biologiques de cette pathologie. C’est au vu de ces réalités que Pierre Fongho Suh a entrepris ces travaux de recherche. Voulant par ce fait, déterminer la nature des connaissances et techniques mises en application par les éleveurs locaux confrontés à la trypanosomiase. « Les résultats de ces recherches ont confirmé la présence de Trypanosoma vivax, le trypanosome bovin le plus transmis mécaniquement, dans le sang des animaux échantillonnés. Le taux d’infection s’est révélé très faible, suggérant une exagération de l’importance de la maladie par les pasteurs », a conclu le Dr Pierre Fongho Suh dans ses travaux. Cependant, « avec la possibilité que ce faible taux d’infection résulte d’un effet du médicament administré à des fins thérapeutiques aux bovins suspects, l’utilisation de troupeaux sentinelles avec BCT pour la détection des trypanosomes est proposée comme une approche viable pour la surveillance de routine dans le contexte actuel », a-t-il ajouté.
Ses travaux avaient pour but de « détecter tout signe de développement de résistance à l’isométadium ».Pierre Fongho a souligné qu’« aucun échec de protection contre l’infection dans le groupe traité n’a été observé. Suggérant que ce médicament continue d’avoir une bonne efficacité ». Au cours de ses recherches sur le terrain, il a réalisé que les éleveurs ont une bonne connaissance de la trypanosomiase animale et ont développé des réponses pour limiter le défi posé par les tabanidés. Il faut par ailleurs reconnaitre que leur exactitude dans la notification des cas de trypanosomiase est faible. De plus, certaines de leurs pratiques représentent un risque supplémentaire de transmission des maladies. De tous les insectes hématophages échantillonnés par le chercheur, Atylotus agrestis était de loin le vecteur potentiel de trypanosomes animaliers, le plus abondant dans la zone d’étude et probablement le principal mode de transmission de ces trypanosomes dans le cadre spatial de l’étude. Au moment de la collecte des données sur le terrain, son abondance était la plus élevée dans le canton de Madiako ; probablement « à cause de la présence d’un cours d’eau à savoir le fleuve Logone. De plus, les tabanidés semblent avoir une préférence spatiale pour les campings » relève le chercheur. Pour lui, « les analyses ont montré que les ailes d’Amynthas agrestis sont polymorphes et aussi diversifiées que celles de T. taeniola ; suggérant que ces deux espèces ont la même propension phénotypique à la plasticité ».
Contrairement aux attentes, « ni le climat, ni la distance géographique n’ont influencé les variations des formes. Le phénogramme basé sur les distances Procrustes entre paires a laissé voir de fortes similitudes entre les populations de Ndiyam shinwa ». De plus, « la population de la plaine inondable était phénotypiquement différente de l’autre population, suggérant que le type d’habitat, plaine inondable ou non est responsable des dissemblances observées. Étant donné que la forme des ailes a une base polygénique, les différences entre les populations pourraient résulter des polymorphismes dans ces gènes ». Cependant, il ajoute que d’autres recherches, y compris des analyses génétiques, « fourniront nécessairement une compréhension globale de la variabilité des ailes ». La prochaine étape de ce travail va consister à : « déterminer les agents pathogènes transmis par les tabanidés au bétail dans les terres pastorales de la région de l’Extrême-Nord ; ressortir la structure génétique des populations de tabanidés des zones pastorales de la région de l’Extrême-Nord et vérifier l’existence d’une répartition des populations par zones géographiques ». Dr Pierre Fongho Suh a recommandé à la Délégation régionale du Ministère de l’Élevage des Pêches et Industries Animales (Minepia) du Cameroun, « une surveillance périodique de la trypanosomiase animale et une sensibilisation des éleveurs à l’usage des médicaments vétérinaires ».