Pr Charles Wondji, Dir. CRID
« Bien évidemment, les défis doivent être relevés avec empressement, au moyen de la recherche et du développement. Il est impérieux de trouver de nouveaux outils de contrôle afin de réduire davantage le fardeau des maladies à transmission vectorielle. »
Comment est-ce que vous contribués à la lutte contre les maladies à transmission vectorielle tel que le paludisme ?
J’étudie la biologie et la génétique des moustiques vecteurs du paludisme, de la dengue et d’autres maladies arbovirales. Il est question dans ce cadre de comprendre la base génétique de la résistance aux insecticides utilisée pour lutter contre les moustiques grâce à des Moustiquaires Imprégnées à Longue Durée d’Action ou à la pulvérisation intradomiciliaire à effet rémanent. Nous détectons les marqueurs de résistance dans le but de concevoir des outils de diagnostic applicables sur le terrain afin de repérer et de cartographier aisément la propagation de la résistance. Ceci permet aux programmes de contrôle de prendre des décisions fondées sur des preuves tangibles, maximisant leur efficacité. Parlant de l’importance de la recherche, du développement et de l’innovation dans la lutte contre les maladies à transmission vectorielle, il faut reconnaitre que bien qu’utiles, les outils existants sont limités dans ce qu’ils nous permettent d’accomplir. Dans le but d’atteindre la pré- ou l’élimination du paludisme, nous avons besoin des meilleurs outils pour surmonter la plasticité génétique des moustiques. Cela ne peut être fait que grâce à une recherche de qualité, à l’innovation des scientifiques et des partenaires industriels.
Pensez-vous que la COVID-19 aura un impact positif ou négatif sur le développement de nouveaux outils de lutte contre les maladies à transmission vectorielle ?
Elle pourrait avoir un impact dans les deux sens, positivement en permettant de générer de nouveaux outils qui seront transférés à la lutte contre les maladies à transmission vectorielle notamment en termes de capacité génomique ou encore de technologies vaccinales. L’incidence négative pourrait être celle des restrictions de déplacements, l’accès aux sites de terrain empêchant ou limitant l’expérimentation de nouveaux outils. Bien évidemment, les défis doivent être résolus en toute urgence par la recherche et le développement. Il est plus qu’urgent de trouver de nouveaux outils de contrôle pour réduire davantage le fardeau des maladies à transmission vectorielle. Le risque de ne pas le faire, c’est que nous pourrions même perdre l’efficacité des outils actuels à cause de la résistance et du changement de comportement des moustiques. Il devient nécessaire d’avoir une longueur d’avance sur eux dans cette course. Si nous voulons parler des innovations les plus prometteuses à cette heure, il serait important de dire que de nouveaux insecticides à mode d’action sont en préparation pour aider à lutter contre la résistance des moustiques ; des outils innovants tels que le forçage génétique font de bons progrès et pourraient aider à lutter efficacement contre les moustiques dans un futur proche et lointain.
Comment faire en sorte que les innovations antipaludiques atteignent les personnes qui en ont le plus besoin ?
Pour s’assurer que les innovations antipaludiques atteignent les personnes qui en ont le plus besoin, elles doivent être abordables. Il doit y avoir des personnes bien formées dans les pays endémiques pour actionner des interventions, l’engagement des masses et assurer une communication d’envergure qui prend en considération les communautés locales. Disposer des meilleurs outils ne garantit rien du tout. S’ils ne sont pas utilisés sur le terrain, ils deviennent inutiles. Pour ce qui est de savoir comment les données sont utilisées pour créer des techniques innovantes de lutte contre le paludisme, je voudrais dire qu’il y a un mouvement croissant vers le libre accès aux données et aux connaissances ; notamment les publications. Leur disponibilité accélère la circulation des connaissances et facilite l’innovation en milieu scientifique. La conception d’un vaccin antipaludique, aiderait grandement. Par ailleurs, il ne doit pas être considéré comme la solution unique. L’atteindre des objectifs de contrôle et d’élimination du paludisme passera par un usage efficace de tous les moyens associés à ce combat.