Face à la résistance croissante des vecteurs du paludisme aux insecticides, le développement de nouvelles stratégies de lutte est devenu urgent. L’utilisation de la bactérie endosymbiotique Asaia apparait comme une alternative prometteuse pour le contrôle paratransgénique des vecteurs du paludisme.
Cette réflexion est la raison d’être de l’étude réalisée par Grace Maffo Tatsinkou. Cette dernière se donne pour mission d’évaluer la prévalence et la transmission maternelle de Asaia dans la population naturelle de moustiques Anophèles au Cameroun. Dans le cadre de ses travaux, les moustiques Anophèles ont été collectés dans huit localités présentant différents reliefs à travers le Cameroun : Mibellon, Gounougou, Bankeng Elende, Elon, Obout, Mangoum et Tibati. Le test PCR (Réaction de polymérisation en chaine) réalisé sur un gène spécifique à l’Acide Ribonucléique (ARN) ribosomique 16S de Asaia, et les échantillons positifs ont été confirmés par séquençage Sanger suivi d’une analyse phylogénétique. La transmission verticale d’Asaia a également été évaluée en détectant par PCR la présence d’Asaia chez les moustiques F1 descendant de femelles F0 Asaia positives.
Au total, 895 moustiques ont été collectés et la présence d’Asaia a été évaluée. Une prévalence d’infection à Asaia de 43 % (384) a été observée chez les espèces An. coluzzii, An. arabiensis, An. funestus et An. gambiae. Cette prévalence était variable en fonction des localités et des espèces d’Anophèles. Elle pourrait s’expliquer par l’existence des voies de transmission hétérogènes, notamment l’alimentation sur les fleurs, les gites de reproduction et les événements de dissémination horizontale et verticale. Par exemple, les taux d’infections les plus élevés d’Asaia ont été observés à Elon, Elende et Obout, qui sont tous situés dans la région forestière. Ce taux d’infection pourrait être attribué à l’abondance de plantes réservoirs et des gîtes larvaires. L’analyse phylogénétique a révélé que Asaia du Cameroun est génétiquement proche des souches isolées dans d’autres parties du monde. De plus, sept variantes de séquence nucléotidique ont été trouvées avec une faible diversité génétique (π = 0,00241) et une faible diversité de variantes de séquence nucléotidique (Hd = 0,481). Enfin, la transmission verticale d’Asaia a été détectée à une haute fréquence (gamme de 42,5 à 100%). Cette étude fournit des preuves préliminaires de la circulation d’Asaia dans les vecteurs du paludisme au Cameroun. La prédominance d’un variant de séquence nucléotidique chez toutes les espèces de moustiques suggère la faisabilité d’une approche de contrôle paratransgénique via la bio-ingénierie d’Asaia dans les vecteurs du paludisme. Ces données fournissent des informations de base importantes pour développer des stratégies potentielles en explorant la possibilité de les utiliser pour le contrôle du paludisme.