Dans sa récente publication, Amelie Wamba a démontré que le Cytochrome P450 CYP325A est désormais l’un des principaux moteurs de la résistance aux pyréthroïdes chez l’Anophèles funestus un des vecteurs majeurs du paludisme dans la sous-région Afrique centrale.
Cette étude vient examiner le rôle de la surexposition à l’enzyme CYP325A P450 dans la résistance aux pyréthroïdes au sein des populations de moustiques Anophèles funestus au Cameroun. L’étude a révélé que ce gène contribue à la résistance aux insecticides à base de pyréthroïdes de type I et II dans la sous-région Afrique centrale. Ses résultats aideront à ouvrir la voie à la détection des marqueurs moléculaires associés à la résistance métabolique à base de pyréthroïdes et faciliteront la conception d’outils de diagnostic à partir d’Acide Désoxyribonucléique (ADN) afin de détecter et suivre cette résistance sur le terrain. Amelie Wamba justifie ces travaux par le fait selon lequel, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) dans son rapport 2020 indique que, le paludisme reste la principale cause de décès en Afrique avec environ 94% de la charge mondiale. Sur 229 millions de cas de paludisme signalés en 2019, 409 000 décès ont été enregistrés dans le monde avec la mortalité la plus élevée chez les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq ans. Le Cameroun pour sa part supporte environ 3% de ce fardeau mondial. En 2019, le paludisme représentait 23,6% des consultations effectuées dans les centres de santé de ce pays ; pour un taux de 68,7% des décès chez les enfants de moins de cinq ans et de 16,9% des décès chez les femmes enceintes. Amelie Wamba précise qu’à travers l’Afrique en général et au Cameroun en particulier, les principaux vecteurs du paludisme sont Anophèles gambiae et Anophèles funestus. Dans le cadre de cette étude, des moustiques anophèles femelles gorgées ont été collectés à Mibellon ; une communauté rurale de la région de l’Adamaoua au Cameroun. Cette région assure une transition entre la savane boisée du Sud et le Nord du Cameroun ; l’on y retrouve des pratiques agricoles intenses impliquant l’usage d’insecticides. Les autres échantillons de moustiques utilisés sont des échantillons collectés lors d’études précédentes menées sur le continent africain entre 2016 et 2019. Les profils de résistance aux pyréthrinoïdes de ces populations de moustiques ont été préalablement établis.
Amelie s’est attardée sur le rôle joué par l’enzyme CYP325A dans la résistance aux pyréthroïdes au sein des populations résistantes d’Anophèles funestus du Cameroun et d’Afrique centrale. Pour celle-ci, la surexpression de ce gène est fortement associée à la résistance aux pyréthroïdes de type I et II au sein de la population étudiée. Grâce à des expériences qRT-PCR, à l’expression de protéines recombinées in vitro, à des tests métaboliques, à des simulations de modélisation in silico et d’amarrage moléculaire, Amelie a découvert que le CYP325A pouvait métaboliser les pyréthroïdes de type I et II, mais avec une plus grande efficacité contre le type I. Ce constat vient mettre sur la table les questions relatives à l’intensité et à l’aggravation de la résistance. La connaissance des mécanismes sous-jacents et des moteurs moléculaires de la résistance aux insecticides est cruciale pour la gestion efficace de la résistance aux insecticides chez les vecteurs du paludisme. Amelie constate qu’au sein de la population de moustiques Anophèles funestus du Cameroun et d’Afrique centrale, la surproduction du P450 (CYP325A) favorise la résistance aux insecticides utilisés pour l’imprégnation des moustiquaires tels que la Perméthrine et la Deltaméthrine. Ce qui pourrait constituer une menace pour l’efficacité de cette catégorie de moustiquaires utilisées dans la lutte antivectorielle. D’une part, ces résultats permettront au Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP) de prendre de meilleures décisions au sujet des moustiquaires à distribuer dans différentes localités en fonction de leur profil de résistance aux insecticides ; d’autre part, ils pourront davantage éclairer la mise en œuvre du plan de rotation de Pulvérisation Intra Domiciliaire (PID). Il faut noter qu’Amelie Wamba est doctorante en biochimie à l’Université de Yaoundé I, au Cameroun. Elle est boursière au Centre de Recherche sur les Maladies Infectieuses (CRID). Ses travaux de recherche portent sur « l’Analyse des mécanismes de résistance aux insecticides chez les vecteurs du paludisme à travers l’Afrique ». Très engagée dans des activités communautaires, Amelie a participé à cinq enquêtes nationales sur la santé et la démographie dans plusieurs communautés du Cameroun. Elle aspire œuvrer pour davantage réduire l’écart entre la recherche et l’élaboration des politiques de lutte antivectorielle plus efficaces et intégrées. Cette doctorante s’appuie sur le Partenariat pour l’Amélioration de l’Impact de la lutte Antivectorielle (PIIVeC) mis en œuvre au CRID pour apporter sa contribution à la sensibilisation et l’implication des communautés dans la lutte contre le paludisme. Amelie est très intéressée par les questions liées au leadership. Celle-ci a été partie prenante du « Mandela -Washington Fellow » 2019 à l’Université de Georgie, à Atlanta aux Etats-Unis ; ce qui lui a permis de bénéficier d’un renforcement de capacités dans le domaine du « leadership en management public ». Son rêve est de donner au plus grand nombre de femmes les aptitudes pour pouvoir prendre les devants dans divers aspects du développement de la vie communautaire.